samedi 19 mars 2011

La loi de financement de la Sécurité sociale

La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) est la loi qui approuve les orientations de la politique de santé et de Sécurité sociale, ainsi que les objectifs qui déterminent les conditions générales de l’équilibre financier de la Sécurité sociale. Contrairement à la loi de finances initiale (LFI) qui détermine les ressources et les charges de l’Etat, la LFSS n’a pas de caractère normatif : la LFI autorise déjà la perception des impôts dont ceux qui sont affectés à la Sécurité sociale. La LFSS établit surtout des prévisions de recettes, des objectifs de dépenses et les conditions de l’équilibre de la Sécurité sociale. Elle a donc, avant tout, un caractère prévisionnel. Elle présente aussi un caractère juridique, une structure ainsi qu'une procédure et des délais d'examen qui lui sont propres.


1/ Le régime juridique de la LFSS est issu de la révision constitutionnelle de 1996 et de la loi organique relative aux lois de financement de la Sécurité sociale (LOLFSS) de 2005 s’inscrivant dans le prolongement de la LOLF. La révision constitutionnelle de 2008 a également introduit l'évaluation préalable.


a) Depuis la révision constitutionnelle de 1996, le Parlement (art. 34 C) peut déterminer les conditions générales de l’équilibre financier de la Sécurité sociale et fixer des objectifs de dépenses compte tenu des prévisions de recettes à travers le vote de la LFSS. Il ne dispose pas d’une totale maîtrise des dépenses sociales puisque la Sécurité sociale bénéficie d’un régime d’autonomie. Il est cependant davantage informé de la situation financière des organismes sociaux qui sont soumis à la même obligation de sincérité que l’Etat. Auparavant, seuls les partenaires sociaux, en tant que représentants des cotisants (entreprises et salariés), géraient les caisses de Sécurité sociale. La révision de 1996 associe les parlementaires à la détermination des objectifs d’équilibre. 


b) La LOLFSS de 2005 s’inscrit dans le prolongement de la LOLF, notamment à travers la promotion d’une logique d’objectifs et de résultats. Cette réforme permet aux parlementaires de débattre de l’équilibre de chacune des branches de la sécurité sociale. Chaque LFSS comporte des tableaux d’équilibre permettant de rapprocher les prévisions de recettes des différentes branches de Sécurité sociale des objectifs de dépenses qui leur sont fixés. Ceci ne verrouille pas les dépenses, mais permet de prévoir, puis d'analyser, les impacts des politiques budgétaires menées dans le domaine de la Sécurité sociale. Trois principales nouveautés sont à remarquer : 
  • le vote du Parlement porte aussi bien sur l'exercice clos que sur l'exercice présent, et même sur l'exercice à venir, ceci dans un souci de rattachement de l'analyse avec ce qui a déjà été fait, et de prospective ; 
  • les parlementaires disposent désormais d’un droit d’amendement et les commissions compétentes en matière de financement de la Sécurité sociale sont tenues informées régulièrement de l’évolution des dépenses et des recettes ; 
  • une annexe de la LFSS présente les Programmes de qualité et d’efficience (PQE) de la politique de Sécurité sociale pour chacune de ses branches et pour les exercices à venir. 

c) En application des art. 34-1, 39 et 44 C, modifiés par la révision de 2008, une loi organique de 2009 impose que les dispositions du PLFSS fassent l’objet d’une évaluation préalable (elle a été mise en œuvre pour la première fois pour la LFS de 2010.) qui consiste en un diagnostic des difficultés à résoudre, des différentes options envisageables et d’une étude de l’impact des dispositions envisagées. 


2/ La LFSS comporte quatre parties contenant les dispositions relatives : 
  • au dernier exercice clos ; 
  • à l’année en cours ; 
  • aux recettes et à l’équilibre général pour l’année à venir ; 
  • aux dépenses pour l’année à venir. 
Le PLFSS doit obligatoirement être accompagné :
  • d’un rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche, celles des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’Objectif national de dépense d’assurance-maladie (ONDAM) voté par le Parlement depuis 1996 et qui fixe un objectif des dépenses de remboursement dans le cadre de l’assurance-maladie (hôpitaux, soins de ville, médico-social), pour les 4 années à venir ; 
  • d’un rapport décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés au dernier exercice clos ; 
  • de neuf catégories d’annexes présentant notamment les PQE relatifs aux dépenses et recettes de chaque branche, les objectifs pluriannuels de gestion et les moyens de fonctionnement dont les organismes des régimes obligatoires de base disposent pour les atteindre, les mesures de simplification en matière de recouvrement des recettes et de gestion des prestations, les mesures de réduction ou d’exonération de cotisations ou de contributions de Sécurité sociale ; 
  • d’un document que le Gouvernement doit adresser tous les 3 ans au Parlement qui présente la liste des régimes obligatoires de base et le nombre de cotisants actifs et retraités titulaires de droits propres ; 
  • différents rapports de la Cour des comptes (sur l’application de la LFSS, la certification des comptes des organismes nationaux du régime général et des comptes combinés de chaque branche, sur les comptes au titre de l’année en cours et de l’année à venir des régimes obligatoires de base, du régime général et des comptes des organismes concourant à leur financement). 
En vue de l’examen et du vote du PLFS, le Gouvernement présente au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, un Rapport sur les orientations des finances sociales, qui peut donner lieu à un débat sur les orientations budgétaires des finances sociales (DOBS) au Parlement, en même temps que le débat sur les orientations des finances publiques (DOFP). Ce rapport comporte une évaluation pluriannuelle de l'évolution des recettes et des dépenses des administrations de Sécurité sociale, ainsi qu'une évaluation pluriannuelle de l'ONDAM.


3/ Comme pour les lois de finances, les LFSS obéissent à une procédure et des délais d’examen. 


a) Le PLFS, le rapport et les annexes doivent être déposés d’abord sur le bureau de l’Assemblée nationale, au plus tard, le 15 octobre. Selon l'art. 8 LOLFSS, Les commissions parlementaires saisies au fond et les autres commissions concernées adressent des questionnaires au Gouvernement (avant le 10 juillet), auxquels il doit répondre par écrit (avant le 8 octobre).

Les délais de lecture se trouvent mentionnés dans la Constitution à l'art. 47-1 C
  • l’Assemblée nationale a 20 jours pour se prononcer après le dépôt du PLFS ; 
  • le Sénat a 15 jours après sa saisie. 
En cas de retard de l’Assemblée nationale, le Gouvernement peut saisir le Sénat du texte éventuellement modifié par les amendements votés par les députés. En cas de retard du Sénat, le Gouvernement saisit à nouveau l’Assemblée nationale du texte soumis au Sénat (modifié également, le cas échéant, par les amendements votés par les sénateurs et acceptés par le Gouvernement). Le PLFSS est alors examiné selon la procédure d’urgence dans les conditions prévues par l’art. 45 C (réunion d’une Commission mixte paritaire). Selon l’art. 47-1 C, si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de 50 jours au total, les dispositions du PLF peuvent être mises en œuvre par une ordonnance spéciale, dite de l’art. 47-1


b) Les lois de financement rectificatives (LFSSR) ont une particularité par rapport aux LFSS : pour leur vote, la partie du projet de loi comprenant les dispositions relatives aux dépenses (partie 4) ne peut pas être mise en discussion devant une chambre avant l’adoption de la partie du projet comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général (partie 3) selon l’art. 7 LOLFSS


c) Les cavaliers sociaux sont les amendements sans rapport avec l’objet de la LFSS, notamment avec les dispositions affectant directement l’équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du parlement. Ils sont interdits tout comme les cavaliers budgétaires dans le budget de l’Etat et sont relevés par le Conseil d'Etat ou censurés, le cas échéant, par le Conseil constitutionnel. La jurisprudence de ce dernier précise toutefois qu’il peut être saisi de la conformité d’une disposition d’une LFSS uniquement lorsque la question de sa recevabilité a déjà été préalablement soulevée par le Parlement. Cette règle s’impose en vertu du fait que les assemblées ont des règlements qui prévoient que le contrôle de la recevabilité des amendements aux PLFSS appartient aux parlementaires. 


d) En ce qui concerne le principe d’irrecevabilité financière, l’art. 7.IV LOLFSS donne une définition de la charge figurant à l’art. 40 C : elle s’entend de chaque objectif de dépenses par branche ou de l’ONDAM. 


e) L’art. 38 de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance-maladie a permis la constitution de Missions d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale (MECSS). Elles sont créées au sein de la commission de chaque assemblée saisie au fond des PLFSS et sont chargées de l'évaluation permanente de ces lois (elles réalisent un contrôle a posteriori de l’exécution des LFSS). Comme pour les MEC de l’Etat, la non communication des renseignements demandés peut entraîner une saisie de la juridiction compétente, statuant en référé, afin de faire cesser l’entrave sous astreinte (art. 10 LOLFSS).

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