La dette de l’Etat renvoie à l’ensemble des engagements financiers de l’Etat. Elle résulte du cumul des besoins de financement de l’Etat, c’est-à-dire de la différence, année après année, entre ses recettes et ses dépenses. Elle ne doit pas être confondue avec la dette publique qui est la dette de l’ensemble des administrations publiques (Etat mais aussi collectivités locales et Sécurité sociale). L’étude de la dette de l’Etat montre qu’elle s’est fortement accrue et internationalisée ces dernières années. C'est l'Agence France Trésor qui est chargée de la gérer au mieux des intérêts du contribuable.
1/ L’encours (= le montant cumulé) de la dette de l’Etat s’élève en 2011 à près de 1 300 Mds €. Il a été multiplié par 20 en 30 ans (en 1980, il était de 64 Mds €). Cette progression est liée à l’accroissement du déficit budgétaire de l’Etat, financé par l’emprunt, et à ses besoins annuels de trésorerie. Elle est d’autant plus préoccupante que la charge de la dette est un élément très lourd du budget annuel de la France : il représente le deuxième poste budgétaire par l’importance, immédiatement après l’éducation nationale, soit 46 Mds € en 2011.
La dette de l’Etat se compose de :
- la dette négociable : c’est la dette dont les titres de créance font l’objet d’une négociation sur le marché, elle s’élève en janvier 2011 à 1 233 Mds € ;
- la dette non négociable : c’est la dette constituée principalement par les dépôts des correspondants du Trésor. Ces dépôts s’élèvent en 2008 à 66 Mds €.
a) Les correspondants du Trésor sont des particuliers ou des organismes publics ou privés qui déposent tout ou partie de leurs fonds disponibles au Trésor. Les correspondants du Trésor peuvent l’être à titre obligatoire (90 % du volume total des correspondants) ou contractuel. Les collectivités territoriales et les établissements publics doivent, par exemple, obligatoirement déposer leurs fonds au Trésor, l'idée étant alors de sécuriser les fonds. Les correspondants à titre contractuel sont les instituts d’émission des DOM-TOM ou les banques centrales de la zone franc. Juridiquement, les fonds de la dette non négociable ne sont pas des emprunts, mais des dépôts à vue, puisque les déposants peuvent les retirer à tout moment. Ils n’en sont pas moins compris dans l’endettement puisque les fonds sont dus en permanence. En revanche, ces dépôts ne sont pas rémunérés.
b) La dette négociable représente la plus grande part de la dette financière de l’Etat (77 % selon l’AFT fin 2007). Elle est composée :
- des emprunts d’Etat et obligations assimilables du Trésor (OAT) qui sont des titres à long terme émis sur le marché obligataire ;
- des bons du Trésor en comptes courants à court et moyen terme (BTF et BTAN).
c) La dette extérieure désigne la part de l’encours de la dette négociable détenue par les agents non-résidents. Elle s’élève fin 2010 à 67,7 % (Qui détient la dette de l'Etat sur le site de l'AFT). Depuis 1998, la dette négociable détenue par les agents non-résidents a considérablement augmenté puisqu’elle était seulement de 20 % en 1997. Le principal facteur de cette internationalisation est la naissance de l’euro qui a conduit à une diversification des portefeuilles des investisseurs notamment grâce à la disparition du risque de change.
2/ L’Agence France Trésor (AFT) a pour mission de gérer la dette négociable de l’Etat (la dette non négociable relève de la Direction générale de la Comptabilité publique – DGCP). Elle a été créée par arrêté en 2001 à partir des services du Trésor chargés de la gestion de la dette et de la trésorerie de l’Etat, auxquels se sont joints une dizaine de professionnels des marchés. Elle compte actuellement une quarantaine de personnes.
a) L’AFT est l’interface entre l’État et les marchés financiers. Elle dispose d’une autonomie dans sa gestion quotidienne de la dette grâce à l’utilisation d’une palette élargie d’instruments financiers (dont les SWAPS). Dans la mesure où les dépenses sont toujours supérieures aux recettes sur l’année, la gestion de la trésorerie de l’Etat est une gestion de passif : il ne s’agit pas de placer au mieux les excédents de trésorerie, mais de s’endetter dans les meilleures conditions possibles.
La stratégie de l'AFT consiste principalement à réduire le coût et la durée de vie de la dette qui est en janvier 2011 de 7 ans et 87 jours. Elle a à sa disposition deux instruments : les contrats d’échanges des taux d’intérêt (SWAPS) et les rachats de dette (rachats de gré à gré et adjudications à l’envers). Les swaps de taux d’intérêt (de l’anglais to swap = échanger) sont des contrats entre deux parties qui conviennent de s’échanger des flux d’intérêt sur une période et un montant donnés ; une partie payant un taux fixe, l’autre un taux variable. La dette de l’Etat a normalement une durée de vie moyenne relativement longue. Or comme la courbe des taux est ascendante (les taux d’intérêts s’accroissent au fur et à mesure que la durée du prêt s’allonge), en réduisant la durée moyenne de la dette, l’AFT peut parvenir à diminuer la charge d’intérêt. Mais les taux courts ont comme particularité d’être extrêmement volatils (ils varient en fonction de la conjoncture), ce qui accroît également la variabilité de la charge d’intérêt. En s’assignant un objectif de réduction de la durée de vie moyenne du stock de dette, l’AFT doit trouver un compromis entre moindre charge d’intérêts et plus grande variabilité de celle-ci. Le recours aux SWAPS permet de limiter la volatilité des cours en échangeant un taux variable contre un taux fixe.
Pour gérer la dette de l’Etat, l’AFT intervient sur le marché financier qui se compose :
- d’un marché primaire : lieu où s’offrent et se demandent les titres lors de leur émission ;
- d’un marché secondaire : lieu où s’échangent les titres déjà émis.
b) Les Spécialistes en Valeurs du Trésor (SVT) assistent l'AFT dans son intervention sur les marchés. Ils ont pour objectif de faciliter l’émission et l’échange de titres. Les SVT sont au nombre de 20 et sont des établissements financiers et des banques de réseau français (BNP, Paribas, Société générale) et étrangers (Barclays, Crédit suisse). Leur principale mission consiste à garantir la liquidité du marché secondaire des valeurs du Trésor, en assurant leur cotation en Bourse. En théorie, l'AFT pourrait se contenter de s’intéresser au marché primaire, mais en pratique, il lui est indispensable que le marché secondaire des valeurs du Trésor soit efficient : le prix des titres émis sera d’autant plus élevé (et donc le taux d’intérêt plus bas) que l’investisseur bénéficiera d’un marché liquide.
Les SVT ont aussi des missions importantes sur le marché primaire : ils conseillent l’AFT sur la conduite de sa politique d’émission, ils ont en charge le placement des titres d’Etat, ils participent aux adjudications et ont l’obligation d’acquérir au moins 2 % des titres émis (OAT, BTAN ou BTF).
c) L’émission des valeurs du Trésor se fait depuis 1985 grâce à la technique de l’adjudication à prix demandé. La syndication bancaire n’est plus utilisée que dans des circonstances spécifiques. L’adjudication est effectuée dans le cadre d’un calendrier prévisionnel : elle consiste à servir les titres au prix ou au taux effectif de soumission. Les offres dont les prix sont les plus élevés sont servies en premier. Celles de niveau inférieur le sont ensuite, jusqu’à hauteur du montant souhaité par l’AFT. Les participants payent des prix différents, correspondant exactement aux prix qu’ils ont demandés.
Tous les établissements affiliés à Euroclear France et ayant un compte à la Banque de France peuvent soumissionner. Quelques jours avant l’adjudication, l’AFT indique le montant qu’elle entend émettre sur les lignes qui ont été désignées dans le calendrier d’émission. Les offres des soumissionnaires doivent être transmises à la Banque de France au plus tard 10 minutes avant l’heure de la séance d’adjudication. La Banque de France les classe puis communique à l’AFT les offres proposées, en préservant l’anonymat des soumissionnaires. L’AFT arrête le montant des soumissions qu’elle retient sur chacune des lignes, le total correspondant au montant annoncé. Les résultats des adjudications sont ensuite communiqués aux soumissionnaires à l’issue du dépouillement et affichés sur les écrans des agences spécialisées (AFP, Bloomberg, Bridge News, Dow Jones, Reuters).
d) Les spreads (signifie écart en anglais) mesurent les écarts de taux d’intérêt pour le financement de la dette publique entre les différents pays de la zone euro. Ils permettent d’apprécier les conditions de financement en comparant les taux d’une dette sur le marché secondaire à une moyenne pondérée des conditions de financement des pays de la zone euro sur l’ensemble des maturités. Les spreads de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal montrent les difficultés que ces pays ont récemment rencontré pour financer leur dette publique.
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