jeudi 17 mars 2011

La Cour des comptes

La Cour des comptes est une juridiction financière autonome et indépendante du pouvoir exécutif et législatif. Elle siège au Palais Cambon à Paris. Elle a été créée en 1807 par Napoléon, mais elle existait bien avant sous le nom de Chambre des comptes. Cette chambre avait été instituée sous Philippe-le-Bel (1268-1314), suite au démembrement de la Cour du roi (afin de moderniser l'Etat, Philippe IV a divisé sa Cour en trois sections : le Grand Conseil examine les dossiers politiques, le Parlement se charge de la justice et la Chambre des comptes des affaires financières).

La Cour des comptes a pour principale mission de contrôler la régularité des comptes publics (État, établissements publics, entreprises publiques, organismes de sécurité sociale et tout autre organisme bénéficiant d'une aide de l'État ou faisant appel à la générosité du public). Elle a aussi une mission d’information de l'opinion publique sur la régularité des comptes. Son organisation est proche de celles des juridictions de l’ordre administratif et judiciaire.


1/ Les différentes missions de la Cour des comptes sont définies à l’art. 47-2 C
"La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l'action du Gouvernement. Elle assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances et de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l'évaluation des politiques publiques. Par ses rapports publics, elle contribue à l'information des citoyens."
En résumé, la Cour des comptes détient quatre missions principales :
  • une mission de contrôle (qui se décline par un contrôle de l’action du Gouvernement, de l’exécution des lois de finances et des organismes faisant appel à la générosité publique) ;
  • une mission d’assistance (du Gouvernement et du Parlement) ;
  • une mission d’évaluation des politiques publiques ;
  • une mission d’information des citoyens.

a) La Cour des comptes détient une mission de contrôle qui se décline en un contrôle juridictionnel, un contrôle de gestion et un contrôle de l'exécution. Depuis 2006, elle certifie aussi les comptes de l'Etat et ceux de la Sécurité sociale.

Le contrôle juridictionnel concerne la régularité des opérations des comptables publics (recettes et dépenses), à l'exception de celles des comptables des collectivités locales (qui relèvent des CRC – la Cour des comptes restant le juge d’appel de leurs jugements). La compétence juridictionnelle de la Cour revêt un caractère obligatoire sur l'ensemble des comptes fournis par les TPG (les ordonnateurs relevant eux de la CDBF). La Cour est saisie d'office avec le dépôt annuel, auprès du Trésor, des comptes de gestion établis par les comptables. Elle suit une procédure inquisitoire, qui devient accusatoire si une irrégularité est constatée. Elle a la capacité d'enquêter sur pièces et sur place. La procédure est également contradictoire tout au long de l'instruction. Les irrégularités relevées par la Cour sont transmises aux autorités administratives concernées et peuvent être communiquées (selon leurs caractéristiques) à la CDBF, aux juridictions judiciaires ou aux AAI compétentes.

Le contrôle de gestion concerne les administration, les organismes publics ou parapublics, ainsi que l’emploi des fonds publics qui sont alloués à des organismes privés ou des fonds issus de la générosité du public (après des campagnes nationales d’appel aux dons). Le contrôle porte sur la qualité et la régularité de la gestion, sur l’efficience et sur l’efficacité des actions menées au regard des objectifs fixés par les pouvoirs publics ou l’organisme concerné. Cette mission se réfère ainsi aux pratiques d’audit de la performance, c’est-à-dire de la vérification des résultats. La Cour énonce des critiques et des recommandations. Elle fait connaître ses conclusions en s’adressant au ministère ou à l’organisme contrôlé. Ces "communications administratives" revêtent plusieurs formes : référés du Premier président aux ministres, lettres de président de chambre, rapports dits "particuliers" sur les entreprises publiques, communications du Procureur général.

Le contrôle de l'exécution des lois de finances de l'État et des lois de financement de la sécurité sociale (LF et LFSS) renvoie au contrôle du respect, par les ministres, de l’autorisation budgétaire votée par le Parlement. La Cour vérifie les résultats tant en dépenses qu’en recettes. Elle contribue à la connaissance précise de la situation financière de l’Etat. Elle procède de manière similaire pour l’ensemble de la sécurité sociale qui obéit à des règles d’organisation et à des principes budgétaires spécifiques très différents de ceux de l’Etat. Ses obligations à l’égard du Parlement sont formalisées par l’art. 58 LOLF (2001) et l’art. 1-VIII LOLFSS (2005). La Cour élabore chaque année plusieurs rapports dont :
  • un rapport destiné à éclairer le Parlement lorsque le gouvernement opère des mouvements de crédits qui doivent être ratifiés par la plus prochaine loi de finances (rapport non publié par la Cour) ;
  • selon l'art. 58-4° LOLF, un Rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l'Etat joint au dépôt du projet de loi de règlement destiné à clore l'exercice en cours (il est remis en mai) ;
  • selon l'art. 58-3° LOLF, un Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques contribuant au débat d’orientation des finances publiques (DOFP) organisé chaque année en juin (attention : il ne faut pas confondre ce rapport avec le Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques qui est remis par le Gouvernement dans la même période aux termes de l'art. 48 LOLF et qui "peut" donner lieu au DOFP). 
Enfin, la certification des comptes est inscrite dans la LOLF (art. 58-5°) et la LOLFSS. Elle recouvre le contrôle de la régularité (conformité aux règles), de la sincérité (application de bonne foi des règles) et de la fidélité (rendant compte de la réalité) des comptes de l’État et ceux des organismes de Sécurité sociale. La première certification a porté sur les comptes de l’année 2006. 


b) La Cour des comptes exerce une mission d’assistance vis-à-vis du Gouvernement et du Parlement. Cette mission d'assistance se traduit par la publication de différents rapports (rapport sur le projet de loi de réglement, sur la gestion des organismes de sécurité sociale, etc.). Si la Cour fixe son programme de travail en toute indépendance, elle procède toutefois aux enquêtes commandées par les commissions des finances du Parlement. Les commissions chargées des affaires sociales ont le même pouvoir pour ce qui concerne la Sécurité sociale.


c) C'est la révision constitutionnelle de 2008 qui a introduit l'art. 47-2 C définissant les missions de la Cour des compte. Elle lui a ainsi officiellement attribué un rôle d'assistance du Parlement et du Gouvernement "dans l'évaluation des politiques publiques" afin d'apprécier les résultats et l’efficacité des politiques mises en oeuvre. C'est dans ce cadre que la Cour des comptes collabore à la Mission d'Evaluation et de Contrôle (MEC) des politiques publiques mise en oeuvre par le Parlement depuis 1999 (la MEC a évalué, par exemple, la gestion du Musée du Louvre ou bien encore celle des Pôles de compétitivité avec l'aide de la Cour des comptes).


d) En ce qui concerne l’information des citoyens, depuis 1936, la Cour rend publique ses observations les plus significatives dans son Rapport public annuel (remis solennellement au Parlement en même temps qu’au Président de la République autour de février).

En outre, chaque année, en moyenne 5 rapports thématiques consacrés à des sujets complexes et correspondant à des enjeux majeurs sont également rendus publics. Les rapports sont édités par la Documentation française et mis en ligne sur le site de la Cour des comptes pour que tous les citoyens puissent y avoir accès.


2/ L'organisation de la Cour des comptes se rapproche de l'organisation des autres juridictions. Elle compte 300 membres parmi lesquels on trouve des conseillers-maîtres, des conseillers référendaires et des auditeurs. Tous les membres ont la qualité de magistrat et bénéficient de l'inamovibilité. Ils sont recrutés en majorité parmi les énarques, mais peuvent aussi provenir du tour extérieur selon des conditions d'âge, d'aptitude et d'ancienneté. Elle est dirigée par un Premier président (actuellement Didier Migaud qui a succédé à Philippe Seguin président de 2004 à 2010). Le ministère public est assuré par le Procureur général, assisté des avocats généraux. La Cour comporte 7 chambres entre lesquelles sont répartis les domaines de compétence de la Cour. Un secrétariat général assure, sous l'autorité du Premier président, l'administration des juridictions financières. Chaque chambre possède un président et 11 conseillers-maîtres.


a) Le Premier président est nommé par décret pris en Conseil des ministres. Il définit l'organisation générale des travaux de la Cour des comptes : il répartit les attributions de la Cour entre les 7 chambres et arrête le programme prévisionnel des travaux de la Cour. Il adresse aux ministres et aux présidents des organismes contrôlés les observations délibérées par les chambres, communique au Parlement les rapports qui lui ont été demandés et publie les rapports dont la Cour a décidé la publication. Les décisions en matière de programme et de publication sont prises après consultation des présidents et du Procureur général réunis au sein du comité du rapport public et des programmes. Pour assurer la direction générale de la Cour des comptes, il consulte la conférence des présidents. Il dirige les services administratifs de la Cour et assure la gestion des magistrats et personnels de la Cour et des CRC. Il préside trois organismes associés à la Cour mais distincts d'elle : 
  • la CDBF ;
  • le Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics ;
  • le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO).

b) Le Procureur général près la Cour est, lui aussi, nommé par décret en Conseil des ministres. Il exerce le ministère public à la Cour des comptes. Il veille à la production des comptes par les comptables publics dans les délais prévus. Il donne un avis sur l'exercice par la Cour de ses compétences facultatives à l'égard de certains organismes. Il engage certaines procédures juridictionnelles : appels, gestions de fait, amendes. Il présente des conclusions, c'est-à-dire des observations, sur les projets de rapports qui lui sont transmis par les chambres. Depuis la loi du 28 octobre 2008, il dispose seul de la possibilité d'ouvrir, sous la forme d'un réquisitoire, une procédure susceptible de conduire à l'engagement de la responsabilité d'un comptable public, à une déclaration de gestion de fait ou à une condamnation à l'amende. En outre, le Procureur général oriente et harmonise l'action des procureurs financiers qui exercent les fonctions du ministère public au sein des CRC. Il exerce les fonctions du ministère public auprès de la CDBF.


c) Chaque chambre exerce le contrôle des comptes et de la gestion des ministères relevant de son champ de compétence. Les contrôles nécessitant une collaboration sont réalisés par des formations inter-chambres. Les présidents de chambre sont nommés par décret pris en conseil des ministres sur proposition de la Cour parmi les conseillers-maîtres ayant exercé plus de trois années de service à la Cour. Une chambre est composée d'une trentaine de magistrats ; des rapporteurs et des assistants participent en outre aux travaux de contrôle. 

Des personnalités ayant exercé des fonctions d'encadrement supérieur de l'État ou d'organismes soumis au contrôle de la Cour des comptes peuvent être nommées conseillers-maîtres en service extraordinaire pour un mandat de cinq années.

Les rapporteurs de la Cour des comptes sont des fonctionnaires appartenant à des corps de catégorie A (niveau administrateur civil ou équivalent) détachés auprès de la juridiction dans un statut d'emploi pour une durée maximum de six ans. Des rapporteurs à temps partiel sont également nommés pour une période maximale de deux ans renouvelable.

Les assistants de la Cour des comptes sont des fonctionnaires, appartenant à un corps de catégorie A (niveau attaché ou équivalent) ou de catégorie B, détachés dans un statut d'emploi pour une durée maximum de six ans. Ils collaborent aux contrôles et enquêtes de la Cour, sous la responsabilité des magistrats et des rapporteurs.

La Cour des comptes peut recourir, à l'assistance d'experts, pour des missions temporaires à caractère technique. Dans le cadre de sa mission de certification, elle peut aussi recruter des experts spécialistes de l’audit comptable. Ces derniers sont des agents de droit public bénéficiant de contrats d’une durée de trois ans.


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